Monday, October 14, 2024

FESTIVAL DU NOUVEAU CINÉMA DE MONTRÉAL • 9 > 20 oct 2024 • Chienne de vie de Xavier Seron

FESTIVAL DU NOUVEAU CINÉMA DE MONTRÉAL • 9 > 20 oct 2024 •

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Dans Chiennes de vies, Xavier Seron nous plonge dans un univers où l’absurde côtoie le tragique, tout en conservant une pointe d’humour noir mordant. Ce film à sketches, qui allie trois récits distincts, nous invite à réfléchir sur la complexité des relations humaines à travers le prisme de l'amour que nous portons à nos animaux. Porté par une interprétation éblouissante, notamment celle d’Arieh Worthalter, lauréat du César, ce long métrage déploie une vision à la fois drôle et poignante de notre société moderne.


Le film s'ouvre sur Tom, un homme transparent dont l’existence est perturbée par la sollicitation de sa voisine, Cécile, qui lui demande de s'occuper du chihuahua de son voisin décédé. Ce petit animal se révèle être un véritable tyran, presque démoniaque. Cette première histoire plante le décor d’un monde où les animaux, bien que présents, deviennent les témoins passifs des tragédies humaines. La performance de Jean-Jacques Rausin ici est remarquable ; il parvient à incarner un homme écrasé par le poids de sa solitude, tout en naviguant habilement entre les moments de désespoir et les éclats de comédie.

La seconde histoire, centrée sur Greta, une égérie du monde de la mode, se penche sur le lien disproportionné qu'elle entretient avec sa chienne, Sophie. La perte de cette dernière déclenche une spirale d’absurdités et de comportements désespérés, montrant à quel point les humains peuvent se raccrocher à leurs animaux dans les moments de crise. La dualité entre la cruauté et la tendresse de cette relation est magnifiquement illustrée, et le film nous pousse à questionner nos propres priorités et la manière dont nous traitons les autres.


Enfin, la troisième vignette met en lumière une romance entre Franck ( ) et Lola, marquée par la présence intrusive d'un animal de compagnie. Cette dynamique interroge la compatibilité entre amour et cohabitation animale, révélant les tensions qui peuvent surgir lorsque l'affection pour un être vivant entre en conflit avec les émotions humaines. Seron réussit à croquer avec finesse les failles des relations modernes, renforçant l’idée que, souvent, nous avons plus de facilité à interagir avec nos animaux qu'avec nos semblables.

Visuellement, Chiennes de vies est une réussite. Le noir et blanc, magnifiquement contrasté, apporte une profondeur aux scènes, soulignant l’absurdité des situations tout en les ancrant dans une certaine mélancolie. La musique classique qui accompagne le film intensifie les émotions, créant une atmosphère à la fois désenchantée et pleine de vie. Cette esthétique audacieuse confère à l’œuvre un caractère intemporel, renforçant l’originalité du récit.

Xavier Seron, après son précédent succès Je me tue à le dire, confirme ici son talent pour explorer l’absurde et la mélancolie humaine. Avec une plume aiguisée, il aborde des thèmes universels tels que la solitude, l'amour et la quête de connexion, tout en jonglant entre le rire et l’émotion. Chiennes de vies se révèle ainsi un véritable ovni cinématographique, alliant finesse d’écriture et performances d’acteurs brillantes, tout en posant des questions profondes sur notre rapport à la vie et à nos compagnons à quatre pattes.

En somme, Chiennes de vies est une œuvre marquante, à la fois joyeusement loufoque et profondément réfléchie, qui mérite une place de choix dans le paysage cinématographique contemporain. C’est une expérience à ne pas manquer, tant pour les amateurs de drame que pour ceux en quête d’une comédie aussi touchante que décalée.

LENA GHIO   

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