Plus bas, 10 secondes d'un détail de l'installation video Floating Sea Palace de l'artiste Lap-See Lam
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Deux expositions, deux mondes, une métamorphose
À l’intersection du passé et du présent, du tangible et de l’évanescent, PHI inaugure son printemps-été 2025 avec une double proposition éblouissante : Bingo de Nico Williams et Théâtre d’ombres de Lap-See Lam. Ces deux expositions, présentées dans les espaces voisins de la rue Saint-Jean, incarnent à merveille le nouveau souffle de PHI, résolument tourné vers la diversité des voix, l’inclusion et l’hybridité artistique.
Nico Williams : perlage de pouvoir
Avec Bingo, Nico Williams signe sa première exposition muséale d’envergure, et quelle entrée en matière ! Le perlage, trop souvent relégué au rang d’artisanat folklorique, devient ici un langage plastique à part entière, complexe, politique et profondément contemporain. Williams, artiste anishinaabe de la Première Nation Aamjiwnaang, transforme des objets du quotidien — téléphones, billets, planches de bingo — en artefacts sculpturaux recouverts de perles vénitiennes. Il ne s'agit pas simplement d'orner, mais de recontextualiser, de sacraliser. Le trivial devient totémique. Chaque perle est une cellule de mémoire, un pixel du récit culturel autochtone.
Avec plus de 30 œuvres, dont plusieurs inédites, Bingo interroge le hasard comme métaphore sociale. Le jeu y devient un espace critique : entre addiction et communauté, entre plaisir et dépendance, entre choix et destin. Lauréat du Prix Sobey 2024, Williams confirme ici sa position d’avant-garde, fusionnant héritage et innovation dans une pratique collaborative d’une étonnante rigueur formelle.
Lap-See Lam : les spectres de la mer
À quelques pas de là, Lap-See Lam nous entraîne dans un tout autre registre sensoriel et poétique. Avec Théâtre d’ombres, elle déploie une œuvre profondément onirique, ancrée dans les récits de la diaspora cantonaise. Deux installations vidéo — Tales of the Altersea et Floating Sea Palace — offrent une immersion sensorielle où se croisent théâtre d’ombres, mythologie, technologies immersives et architectures fantasmées.
Floating Sea Palace, projetée dans une structure d’échafaudages en bambou, devient un navire mémoriel flottant entre mythe et modernité. Le spectre de Lo Ting, cette créature hybride mi-homme, mi-poisson, hante l’écran comme une allégorie du déracinement et du désir de retour impossible. Chez Lam, l’imagerie traditionnelle se mêle aux codes numériques pour explorer les zones grises de l’identité diasporique, là où la mémoire ne peut être que fragmentaire, altérée, recréée.
PHI : laboratoire du présent
Ces deux expositions, aussi différentes dans leurs médiums que dans leurs univers, se répondent avec une justesse étonnante. L’une articule le tangible, le tissé, le minutieux ; l’autre se déploie dans le flou, l’ombre et la réverbération. Ensemble, elles redéfinissent la manière dont les récits culturels minorisés peuvent habiter les lieux muséaux — non comme des objets d’étude, mais comme des sujets actifs, en perpétuelle métamorphose.
Avec cette double proposition, PHI inaugure aussi un nouveau modèle d’accès flexible et inclusif, confirmant sa mission : faire de l’art un espace de dialogue, de communauté et de réinvention.
25 avril au 14 septembre 2025
451 et 465, rue Saint-Jean PHI
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